Ce livre, découvert par une critique d'une lectrice que je n'apprécie guère tant je la trouve imbue d'elle même et affligeante de vouloir snober autant qui que ce soit pour prôner liberté et caractère bien trempé (totalement fictif puisque quand on est pas authentique, même juste de temps en temps, quelque chose coince littéralement dans l'image que l'on veut soumettre de soi aux autres), mais que je lis parfois tout de même pour les livres que je suis sûre de ne pas lire, par amusement et curiosité, m'avait semblé vraiment très, très, très bien. Je cédai. Car il faut parfois revenir sur ses propres sensations et s'ouvrir aussi à certains modes de fonctionnements mécaniques qui cachent souvent d'autres paysages personnels.
Peu s'en fallu que je ne tombe la tête dans le plat à contrario de toutes les critiques que je viens de lire. En contre, j'aime beaucoup l'auteur, qui m'intéressera quoiqu'il en soit pour ses autres écrits.
Autant d'accroches dans ce livre, d'intérêts de réflexions que je puisse rejoindre, pourtant :
SPOIL : [j'ai bien peur de n'être pas tout à fait convaincue. Il est vrai qu'il y ait une accroche sur la psychologie des persos. Ok. Malheureusement pour moi, l'intrigue ne tient pas la route car en tant que mère, je n'aurais en aucun cas pu partir dans les limbes d'une irrévocable souffrance en faisant abstraction du réel, en mettant de côté les évidences en action, en ne juxtaposant et ne confrontant aucunement les dires du père à la réalité des faits, (depuis quand je laisserais partir un marmot dans le mauvais temps qui plus est dans un endroit dangereux parce que quelqu'un d'autre s'en fout ?, et dans la tempête à venir ?, depuis quand je déléguerais à l'enquête la mort de mon propre enfant ? Ne parlons pas de mes propres suspicions naturelles. Me limiter au seul témoignage du père, que je trouverais bravissime d'avoir sauté dans l'eau, et que je croirais juste parce que j'aime bien sa main sur ma nuque : NEIN.
En plus, je ne vois pas comment j'aurais pu une seconde passer outre le fait que les vêtements en question n'aient pas été mouillés et salés par l'eau de mer ? Je les aurais probablement inspectés et remis d'office comme pièce à conviction, que je soit convaincue ou non de la responsabilité de qui que ce soit.
Autant pour la Madame du Palais de justice qui a donc fait tout de même l'École de la magistrature pour devenir juge d'instruction mais en papier c'est bien clair, car qui sur une enquête telle que celle-ci n'aurait pas et en premier lieu le ou la juge d'instruction, fait mettre sous scellés les vêtements du père, mis à part quelqu'un d'abruti par des médicaments, une dépression, ou un zéro formalisme qui touche aux modes de preuve au pénal ? Bon on y était pas encore mais au moins, l'idée de la preuve par présomption judiciaire ? Je ne sais pas. Rien ne m'allait. Ce rien de professionnel m'effraie.
Dès les premières pages, l'improbabilité (et l'on sait que la réalité sait nous montrer pourtant que tous ce qui est impossible a priori peut exister), l'improbabilité donc de se retourner pour chercher un portefeuille tombé derrière soi en laissant un gosse marcher dans la tempête sans lui tenir la main au bord d'une mer furieusement déchainée est complètement con. (un jugement peut-être erroné car n'importe qui qui a pu avoir sous garde un enfant, le sien ou non, sait que tout peut vriller en un quart de seconde juste parce que la vie est ainsi faite).
Ok, on voit constamment des gens, parents ou pas agir ainsi. Mais ainsi, on ne peut croire une seconde à la version du père en questions. Alors oui, il y a tous les ingrédients y compris peut-être cinématographique pour faire un très bon téléfilm, mais sans être de la partie, peut être parce que j'ai mangé des policiers à outrance depuis mes plus tendres années, je suis sévère, très sévère dans mes jugements sur les textes. Pourtant je serais tout aussi capable de produire quelque chose de pas terrible. Je m'en vois bien capable autant que n'importe qui.
Je crois encore que l'éditer à ce stade, c'est la perte réelle d'un roman qui quelque peu retravaillé encore, aurait pu être vraiment très bon.
Je comprends qu'on puisse avoir envie d'éditer un livre qui tient facilement dans les mains, la maison d'édition est agréable, certes, mais pourtant, le nom de la maison d'édition, "La manufacture des livres" invite à se projeter bien violemment sur la qualité attendue. Pari réussi pour l'objet livre, soyons sympa ! ]
Donc, pour finir, oui, ce n'est pas une lecture désagréable. Non, je n'adhère pas au format final qui méritait plus de discipline (même si je comprends très bien qu'on puisse avoir envie de lâcher l'écriture d'un livre à un stade donné. Cela reste tout à fait prometteur pour les écrits de l'auteur à venir, ou peut-être passés, je ne sais pas.
Il s'agit ici de violence contenue, pour un de ces hommes tandis que l'autre laisse sa violence émerger sans complexe. Sont-ce des hommes ? Évidement !
Cela nous invite aussi à réfléchir sur la notion de la masculinité, et de la réalité que vivent les hommes par rapport à la réussite, et aux constructions mentales autour de ce qu'est "être un homme", de ce que sont les hommes, et de ce qui fait un couple, un lien, un amour, une rencontre, et tutti quanti. Un brin déçue, si on peut dire, j'attendais mais c'est de ma faute, beaucoup beaucoup mieux : alors que je me laisse rarement séduire par les propos de qui que ce soit autour d'un livre, même si j'écoute de plus en plus ce qui peut m'en être transmis contrairement à une façon de faire encore assez récente, il est vrai que pour moi lire une critique avant d'avoir lu un livre, si je veux le lire est quasiment toujours un pari perdu. Sauf exceptions (que voulez-vous, il est parfois temps de fonctionner quelque peu différemment juste pour avoir un vent de fraîcheur. Et je m'en félicite, car j'ai pu rencontrer des auteurs inconnus qui m'ont bien emballée par leurs écrits.
En réalité, je rêve de lire quelque chose qui supporte la réalité du Droit avec finesses et subtilités ou dans une histoire ficelée comme dans un bon boucquain génialissime ou alors même sur une enquête merveilleuse autant pour l'écrit que pour l'histoire. Je n'ai pas encore trouvé chaussures, et vous-mêmes ?