dimanche 20 juin 2021

COUP DE FUSIL, Chapter 3, SHORT et Kaja

We are perceivers. We are awareness, we are no objects, we have no solidity. We are boundless, 

DON JUAN

Kaja le regardait s'agiter au milieu de la fête. Le temps clair et sans nuage permettait de voir chaque personne bien distinctement. SHORT était et n'était pas. Grand, fier et efféminé, tout en longueur, de petits yeux pas tout à fait malfaisants montraient la moitié du chemin entre ce qu'il était et ce qu'il n'était pas. 

Très au fait de certaines formes de mondanités, il perdit ici pourtant toute contenance. 

Au méchoui, il fut aspiré par la présence d'une grande blonde de 16 ans en short blanc avec des jambes interminables et les dents en avant, qui riait sottement à tout ce qu'on lui disait. 

Tandis, qu'ils passèrent devant Kaja, sans même l'apercevoir, il se retourna vers un camarade de l'armée de passage qui fêtait ses 20 ans par la même occasion, 

et lui lança :

_ Viens, viens, viens vite ! On suit la blonde, on a peut-être une chance de s'la faire à deux. 

Et l'autre branque** le suivi. Kaja ne connaissait personne, et les vit se fondre parmi les convives dans le champs vers la grange tandis que Matt planta ses yeux dans ceux de Kaja et lui dit sans qu'elle ne réponde :

_ T'es bonne

Sur le même angle, 4 hommes tenaient un mouton hurlant par les pattes, tout le poids de son corps pendait vers le sol, et la bête fut transportée sans pitié près de l'étang, ils la pendirent par les pattes sans façon, le poids de son corps ballotant et Salt lui trancha l'avaloir au couteau. Des soubresauts agitèrent le mouton et du sang gicla au sol par saccades.

*l'avaloir : le gosier

** branque : idiot, âne


samedi 19 juin 2021

COUP DE FUSIL, Chapter 2

Lieux situés entre quelque part et quelqu'un

 

Salt de taille moyenne, des yeux sombres affutés et malins, la bouche fuyante, des traits abrasifs moulés par les saisons, coupait les haies, tondait les pelouses, servait un et tous contre quelque argent en monnaie de singe, et à 13 ans s’obligea au bonheur d’une bonne épouse qui se ragaillardissait de sa chair fraîche en l’exploitant pour assouvir des pulsions qu’elle ne pouvait satisfaire avec son mari, un brave type à l’air de rien. Il se crû consentant. Elle se servit si goulument de son corps, en lui faisant faire ce à quoi il n’avait jamais pensé, qu’elle le dégoûta pendant tout un été des libertés qu’il prenait par ici et par là, avec une fille ou l’autre. Cet été là, il en avait péché une que tous envièrent qui sortait à peine de l’enfance. Elle parlait peu, il s’exprimait pour elle, il faisait tout pour elle.

 

Un jour sans pluie, il vint la chercher en mobylette trafiquée et l’emmena faire des allers-retours  dans le canton.

 

- On va où ?

- Tu verras. Surprise.

Dix kilomètres plus loin, il la débarqua à la décharge.

-  Qu’est-ce qu’on fout là ?

- Attends tu vas voir, ça va être marrant. Bouge pas, j’ai oublié un truc, je r’viens.

- Tu vas pas m’laisser là ?

- Si, mais je r’viens.

- Sans déc, je préfère pas.

- J’peux pas, sinon, on va s’faire repérer à deux. Faut pas que personne nous voye ensemb'

- Combien de temps ?

- Au pire, deux heures à vol d’oiseau

- Tu t’fous d’ma gueule ?

- Même pas. Faut juste pas que j’tombe dans un guet-apens, si je m’fais choper par les anciens à la cabane, ils vont m’miner au vin blanc. Je passe par les bois.

- Nan bah génial, et je fais quoi en attendant ?

- Compte les rats.

COUP DE FUSIL, Chapter 1

 Il n’y a pas de terreur dans un coup de fusil, seulement dans son anticipation, Alfred Hitchcok 


Dans les vallées du Ster, on pouvait se planquer dans tous les recoins et même épier ses voisins. Il fallait pour cela, faire attention aux déplacements car l’identification au véhicule était l’activité principale des gens du village. 

L’mec :

- Sarro était chez les les Baldu, garé devant l’chêne, tranquille quand je suis passé sur la route.

La belette :

- Ils sont fâchés depuis des lustres, pourtant. L’gros chêne ? Ah, il voulaient qu’on les voient alors.

- J’sais ben.

- Y complotent pour acheter la ferme ensemble ?

- Va savoir.

XXX


Tandis que nuit noire s’abattait sur le village, les deux marmots se retrouvaient en cachette, la nuit, dans le jardin, faisaient l’mur et partaient marcher en forêt, sur les routes, et errer dans les bâtisses alentours, à la recherche d’un rien d’attrayant, un briquet en poche et quelques clopes pour la virée. Parfois, mais rarement, ils devaient se jeter dans l’fossé, pour n’être point surpris par un quidam qui passait sur la route. Une fois ils avaient bien chauffé : ils virent débouler un gars inconnu qui avait perçu quelque chose et ils se retrouvèrent, elle dessous lui dessus pendant une vingtaine de minutes, collés l’un a l’autre sans plus pouvoir bouger, par une nuit chaude ou les bestioles viennent te sucer la moelle même en heures sombres. Ils commençaient à être engourdis de ne pouvoir bouger quand l’blaireau de passage, phares éteints au milieu de la route, se décida à rallumer la carlingue après avoir erré autour du bois, l’fusil à la main, à la recherche de sa suspicion de bête à abattre de nuit pour la rapporter aux copains et s’faire payer un bon coup sur la tête et gratis pour l’anecdote. Ils flippèrent un peu car l'entendirent être à la limite de noyer l’moteur. Ça commençait à faire. Sa vieille caisse toute défoncée ne gageait rien de bon en ce qui concernait le m’sieur, habillé en goguette comme un trouduc, c’était pas l’problème, mais sur la goule, s’emplafonnait la vilénie du type qui faisait peur aux mouches. Enfin, il démarra pour disparaître et la lumière des phares de sa caisse bringuebalante crachant des poumons à chaque tour de roues s'éteignit à l'horizon.





Et puis PHARE 23

 A vrai dire, je n'arrive plus à lire. J'ai commencé comment qu'y s'appelle ? Celui qui a écrit Silo ? HUGH HOWEY. J'en suis à une bonne moitié. C'est pas mal pour l'instant. En attendant de retrouver l'impulsion de lire, je commence un énième travail en cours; à suivre sur ce blog. En espérant un contrat d'édition qui tombe du ciel, gros comme une météorite parce que ma banque a mal aux dents.


vendredi 18 juin 2021

Titre Original RYOJU (Tokyo, Japon, 1961 - Le Fusil de Chasse

Ce court roman édité chez Stock et traduit du japonais par Sadamichi Yokoö, Sandford Glodstein et Gisèle Bernier est je crois une deuxième lecture de cet auteur, Yasuki Inoué, que j'ai trouvé par un heureux hasard, après avoir lu plusieurs décennies en arrière, Le Maître de Thé.

Il se lit vite, et c'est un des premiers auteurs japonais que j'ai volé dans la bibliothèque familiale ou je pouvais piocher en douce tout ce qui me tombait sous la main dès lors que l'on ne me visse*. A ces côtés trônaient Mishima, Kawabata, Tanizaki, Sōseki, Kensaburō Ōé, Nosaka que je dévorais comme une ogresse affamée. A 13 ans, je me régalais avec cette zone attirante qui campait dans le salon. Pour compléter ce périple qui me plongea sur une douce brise d'écrits asiatiques inconnus jusque-là, j'allais errer dans le même temps fouiner dans une librairie, qui présentait dans une sommaire et vaste pièce carrée, avec un petit espace à l'arrière, des oeuvres asiatiques dans un petit recoin sur une semi-bibliothèque posée au sol. Le tenancier exposait sa littérature habituellement sur des planches soutenues par des tréteaux en bois. J'étais toujours bien reçue, et je pouvais m'accroupir, rester invisible pour choisir ce que j'allais acheter, sans qu'il ne me dise quoique ce soit. Parfois je restais longtemps, longtemps, longtemps incapable de me décider entre l'un et l'autre livre, je les feuilletais tous, et je me relevais écarlate et crevée d'avoir soutenu une posture Malasana en grenouille, et en me relevant, je ressemblais à une vilaine crapaude qui aurait aimé se cacher  derrière les bibliothèques.

Aujourd'hui, je me rends parfois dans cette même librairie, que je fréquente maintenant un peu comme si j'étais en grève sporadique après une interruption de 20 ans, eux, ne me connaissent plus, le libraire n'est plus le même, la librairie s'est agrandie et modernisée, et quand je prends un livre pour l'acheter en errant toujours quelque peu pour découvrir ce qui peut s'y trouver comme dans une bibliothèque, on me prends pour une voleuse potentielle et je suis suivie, on m'aborde la plupart du temps en jetant un coup d'oeil vers le livre que je tiens comme si par hasard je voulais l'chourave parce que mon bras qui reste parfois collé le long du corps comme pour exercer une pression rebelle et insoumise au dicktat des cellules nerveuses, avec le livre apparent qui m'intéresse accroché à une main, leur donne cette impression. C'est drôle, en quelque sorte. Quand je suis d'humeur blagueuse, je joue avec le vendeur qui me suit, c'est toujours le même qui est suspicieux, et je tourne dans la librairie en tous sens pour le faire tourner en bourrique.


*de visser (et plus).

Enjamber la flaque où se reflète l'enfer, Souad Labize

Il est ce tout petit livre d'un titre hautement pertinent autant que poétique. Il est fulgurant et je dirais presque magistral, tellemen...